" Les plages du littoral ne laissent rien à désirer pour
la commodité des baigneurs, seul, manquent les moyens de communication pour les
atteindre. " Ainsi gémit le conseil municipal de Mesquer en 1861.
C'est bien vrai; l'isolement de Mesquer au bout du monde, entre Loire et Vilaine, loin des
grandes routes et des voies de chemin de fer, a retardé de cinquante ans l'arrivée des
touristes sur des rivages aussi enchanteurs que d'autres devenus déjà célèbres.
Les écrivains du dix-neuvième siècle qui ont traversé le pays , Flaubert, Zola,
Daudet, n'ont guère décrit son littoral faute de pouvoir l'atteindre; les guides
touristiques de La Belle Époque l'ont ignoré, aucun de leurs " reporter " ne
s'étant aventuré à travers les landes épineuses et les marais qui bordaient la Baie de
Mesquer.
Les premiers estivants, qu'on appela alors " les étrangers ", ne sont donc que
des voisins venant passer leur dimanche sur nos côtes, tels les commerçants guérandais,
ou des familles ayant des relations dans le pays et des moyens personnels pour venir s'y
ébattre.
Ils ne furent point déçus et surent si bien dépeindre le pays avec le charme de ses
plages, les pêches fructueuses qu'on faisait dans ses criques, les splendeurs
insoupçonnées de la zone des marais salants et des bois, qu'ils furent les pionniers du
tourisme mesquérais.
Pendant que leurs collègues tentaient leurs chances en investissant leurs capitaux à La
Baule, quatre commerçants de Guérande établissaient sur nos côtes les premières
constructions de plaisance, modestes chalets de bois, bientôt remplacés par des
édifices de pierre.
En ce temps-là, c'est-à-dire quand " la station " n'était encore que
naissante, venir à Mesquer-Quimiac était un voyage au long cours. Parti de Paris ou de
Nantes, le touriste de la Belle Époque devait changer de train à Saint-Nazaire et à La
Baule-Escoublac, laisser le chemin de fer à Guérande, pour prendre " le courrier
" de Toussaint Morenton ou de Vincent Thébaud, qui, par la rusticité de ses
voitures et de ses équipages, annonçait un monde nouveau.
Ce monde était celui des anciens cap-horniers, des paludiers et des douaniers. Et vous
découvriez les villages blancs, les landes griffées d'or, une population attachée aux
travaux du sel, de la terre et de la pêche. Sur le littoral, la nature multipliait les
contrastes de part et d'autre du petit isthme de Mesquer, avec sa chapelle toute semblable
à une barque, la proue dans les varechs, et la poupe dans les sables. Si le suroît
déferlait sur Lanséria, la mer était calme au Toul-Ru, à peine agitée à Sorlock,en
sorte qu'on pouvait toujours profiter des plaisirs marins et de l'air iodé qui purifiait
les bronches.
La fin de la " grande guerre " amplifia la venue des touristes, à qui la
circulation du petit train rendait l'accès de Mesquer plus facile. Les premiers chalets
reprirent vie. Les locations se développèrent, une floraison de constructions neuves
s'épanouit...
Puis un événement d'importance allait permettre l'implantation de toute une zone
résidentielle à l'ouest de Quimiac, la vente du bois de Lanséria, planté quelque
soixante ans plus tôt. Un lotissement de 127 parcelles, avec jardin public et accès à
la mer, y est bientôt dessiné. Pratiquement, les lots sont tous vendus avant 1940 et
beaucoup de chalets déjà édifiés sous les pins.
Quimiac devenue station balnéaire, voit son centre vital se déplacer vers la lisière de
son bois. c'est là, sur la place, qu'a lieu le marché, très fréquenté l'été. Mais
les vrais pôles d'attraction, ce sont bien sur, Le bois et l'océan. Le bois a chaque
mouvances des saisons renouvelle ses splendeurs. Le printemps l'habille de mimosas,
l'été l'anime d'une foule bigarrée souvent trop bruyante et trop dense; dans la
lumière de l'automne les chalets se parent du pourpre du pourpre des chênes et les pas
sont étouffés par le tapis roux des aiguilles de pin; l'hiver, lui même, n'y est
monotone qu'aux quelques jours de tempêtes, lorsque
"l'orgue des pins mugit dans le vent des galernes"